C’est avec un grand plaisir que j’ai pu lire le nouveau livre de Laurent Alexandre et Jean-Michel Besnier « Les robots font-ils l’amour ? Le transhumanisme en 12 questions« . Le thème m’intéresse particulièrement car il très lié au développement de la réalité augmentée au service de l’Humain et, plus généralement, aux conséquences de l’augmentation.
Avant de commencer, je vous avoue que je ne comprends de tout le titre de cet essai. Même s’il y a bien un chapitre qui traite de la question, il reste assez marginal dans l’ensemble des réflexions. Donc soit je n’ai pas compris le sens profond de ce titre, soit le marketing est passé par là avec une analyse de tendances en 234 pages pour appâter le chaland 🙂
L’essai est construit comme un dialogue entre les deux auteurs qui, c’est le moins qu’on puisse dire, ne partagent pas la même vision du futur de l’humain. C’est une forme extrêmement agréable pour moi, un vrai débat d’idées avec passion mais avec également beaucoup d’écoute. Sur le fond, il vaut mieux à mon avis lire ce livre si on n’est pas trop dépressif … Car malgré des points de vue balancés, il porte pour moi une vision assez dystopique du futur proche.
Je ne prétendrai pas résumer tout le document en un simple article mais simplement en tirer deux idées qui semblent émerger sur l’ensemble des sujets.
L’inéluctabilité de l’évolution
C’est plutôt un thème porté par Laurent Alexandre. Nous sommes déjà et depuis longtemps dans un modèle transhumaniste où tout notre savoir est concentré sur l’amélioration de notre vie et son prolongement. Il n’y a pas de débat, nous aspirons à moins de maladies, plus de contrôle sur nos existences et notre descendance. Nous voulons plus de connaissances et moins d’apprentissage (les GAFA le savent bien) quitte à utiliser toutes les technologies qui nous tombent sous la main.
Serons-nous capable d’aller contre cette nature ? d’ « encadrer » d’une manière ou d’une autre les choses ? de prendre de la distance par rapport à des sujets aussi terribles que la mort ? Le monde actuel nous donne peu de signaux positifs sur le sujet même si des visionnaires comme Joël de Rosnay pense que cette prise de conscience est possible.
L’impossibilité de se projeter
C’est particulièrement vrai dans le chapitre sur la vie éternelle où Jean Michel Besnier tourne sans cesse autour de « la vie n’est rien sans la mort ». Même si la philosophie peut extrapoler sur ce sujet, en pratique on en sait rien. On suppose que l’intérêt de la vie disparaît, de l’existence n’a plus de sens … mais rien de nous donne des pistes. Je me demande parfois si vos vies d’aujourd’hui qui dure 80 ans sont moins intéressantes que celle du 16ème siècle où dépasser les 30 ans était un exploit ? Tout cela pour dire que l’humanité que nous sommes en train de fabriquer, est au delà de notre propre compréhension. C’est finalement assez dérangeant 🙂 Cela me rappelle la réflexion sur l’évolution de l’IA de Olivier Ezratty :
« En tout cas, quoi qu’il arrive, l’intelligence d’une machine hyper-intelligente n’aura pas une intelligence similaire à celle de l’homme. Elle sera probablement plus froide, plus rationnelle, moins émotionnelle et plus globale dans sa portée et sa compréhension du monde. L’intelligence artificielle sera supérieure à celle de l’homme dans de nombreux domaines et pas dans d’autres. Elle sera simplement différente et complémentaire. »
Les avancées de l’intelligence artificielle – Olivier Ezratty
Un contrôle ?
Evidemment combiner une évolution inéluctable à un fort aveuglement sur le futur ne permet pas d’imaginer facilement la possibilité de contrôler tout cela ! Le chapitre « Faut-il légiférer » est particulièrement intéressant puisqu’il constate un dépassement complet du pouvoir politique actuel par ces questions. Malheureusement, une alternative plus « collaborative » ne semble pas non plus apporter de solution …
Lien avec la réalité augmentée et conclusion ?
J’ai eu l’occasion de l’aborder dans plusieurs articles sur ce site, une étape actuelle de l’augmentation de l’humain est évidement la réalité augmentée, qui lui permet de percevoir « plus » qu’avec ses sens normaux. Sans extrapoler trop, on peut facilement mettre en lien l’évolution des usages de cette technologie et les deux points cités plus. Il parait assez évidement que se diffusion dans les mondes professionnels et personnels est inéluctable (et à déjà commence), même si les interface matérielles ne sont pas encore abouties. Au risque d’enfoncer une porte ouverte, cela suppose donc que tous les secteurs soient prêt à répondre à la demande du public …
Pour le second point, il renvoie au peu de recul sur l’utilisation de la RA, en particulier dans l’industrie. Les chiffres sont bons en terme d’efficacité et de rentabilité mais sur l’évolution du travail et de la manière de travailler, on ne sait rien. Est-on en train de créer des génération d’opérateurs assistés, incapables d’actions autonomes ou de contrôle de l’assistance qu’on leur propose ? Impossible de le dire.
Bref, un peu comme pour le livre de Béatrice Jousset-Couturier il n’y a pas de conclusion … sauf peut-être que nous sommes tous acteurs de l’évolution des technologies et qu’il est toujours dangereux de laisser les autres la penser à notre place 🙂 Bonne lecture !