
Je vous propose une nouvelle plongée dans un des panels de l’AWE 2025 qui cette fois porte sur le thème de l’impact de la XR dans la musique ou, pour être plus précis, sur l’industrie musicale. N’étant pas un spécialiste de ce domaine, j’ai pris plaisir à écouter Jacqui Bransky (Warner Records), Daniel Kelly (W-RLDS) et Reed Matthews (W-RLDS) partager à la fois leur expérience et leur vision sur l’évolution du secteur. Comme toujours, je vous invite à consulter la vidéo pour en apprendre plus.
Les liens entre musique et XR ne datent pas d’hier, même si la période de pandémie a remis en lumière ses tentatives. Je ne vais pas rentrer dans une liste exhaustive des expériences, mais on se souvient de la médiatisation des concerts dans Fortnite avec des artistes comme Travis Scott, du récent concert de Metallica pour l’Apple Vision Pro ou des performances proposées par l’entreprise VRROOM. La majorité des propositions sont plutôt en réalité virtuelle, mais il existe également des usages particulièrement intéressants de la réalité augmentée comme les concerts de Gorillaz dont je parle dans un article précédent. La question qui revient aujourd’hui, et qui se pose dans ce panel, est celle de la difficulté du passage à l’échelle.
Les différents acteurs du domaine et leurs intérêts
Les orateurs expliquent que la musique est une chaine de production complexe, de l’artiste au client final. Chaque partie à ses propres contraintes et ses propres attentes de la XR, qui peuvent parfois être complètement contradictoires.
Les artistes et les fans
Les artistes recherchent en général des moyens de renforcer le lien avec leur public. Ils veulent créer des moments uniques et authentiques de connexion. L’émotion est importante dans ce lien et toute la difficulté, que nous avons vu surgir au moment de la pandémie, est de trouver des moyens à la fois « scalable » et intimes. Ces demandes sont en lien direct avec les attentes des fans qui recherchent des moments exclusifs pour renforcer leur proximité avec l’artiste. Notez d’ailleurs que la notion d’exclusivité n’est pas absolument synonyme de rareté. Nous rêvons tous d’un concert privé évidement, mais un moment immersif dans un studio d’enregistrement (ou dans les loges avant concert) est aussi très puissant. C’est le principe de l’expérience proposée par Metallica en partenariat avec Apple ou les enregistrements disponibles aujourd’hui régulièrement dans « Venues in Horizon Worlds » par Meta.
Les labels
Ils recherchent des expériences qui vont générer du streaming et donc pouvoir être relier à toutes les formes de commercialisation des morceaux. Ils voient dans ce cas la XR comme un investissement en marketing qui doit donc avoir un ROI et des KPI assez clairs : vues, partages, streams, revenus indirects, etc. C’est aussi une manière de mettre en valeur des artistes disparus et/ou des contenus inédits comme l’album posthume “Balloonerism” de Mac Miller.
Les festivals

Les personnes du panel prennent pour exemple le festival Coachella qui recherche à la fois une proposition d’expérience inédite pour se différentier des autres festivals et un moyen d’exister hors de ses limites physiques. Nous sommes ici proches des demandes du commerce (retail) ou il faut à la fois attirer un nouveau public par le contenu et fidéliser les habitués en les connaissant mieux et en gardant un lien constant.
Les plateformes de diffusion
L’impératif ici est de générer du revenu en retenant les utilisateurs sur la plateforme. L’impact social (viral) doit être fort pour assurer le maximum de visibilité et, en corollaire, l’accès doit être extrêmement simple pour le spectateur. La difficulté particulière ici est dans la création d’un catalogue d’artistes et d’expériences avec une assez grande homogénéité d’accès et de format pour rentabiliser les investissements. On comprend par exemple l’intérêt d’utiliser des outils comme Snap AR qui proposent toutes ces caractéristiques.
On pourrait également parler des producteurs ou des marques partenaires qui ont leurs propres critères de succès.
Quelles pistes de développement pour les acteurs de la XR ?
Jacqui Bransky, Daniel Kelly et Reed Matthews partagent dans ce panel plusieurs conseils pratiques provenant de leurs propres expériences. Le premier, vous l’avez compris, est déjà de savoir précisément à qui on s’adresse ! Les artistes sont souvent plus réceptifs et enthousiastes que les labels, mais en contrepartie ont leur propre vision artistique et rien n’assure qu’elle soit réplicable. Miser sur des artistes innovants ou curieux, servira à fabriquer des « cas d’usage » qui pourront ensuite convaincre d’autres acteurs.
Les labels hésitent à investir dans des projets non éprouvés. Savoir proposer des expériences « simples », avec des objectifs économiques clairs et des KPI mesurés, reste une bonne manière de mettre un premier pied dans le domaine. Cela implique aussi de savoir présenter la scalabilité du projet où, pour le dire simplement, le déploiement va améliorer le ROI. Aujourd’hui encore, les expériences qui demandent trop de logistique physique ou un matériel peu accessible (casques VR) sont difficiles à vendre.
Enfin, et cela reste vrai pour la plupart des domaines, il convient de montrer en quoi la XR a un avantage compétitif naturel face aux autres technologies ou aux autres moyens de promotion. C’est d’autant plus vrai dans la musique que le secteur est déjà habitué à jouer avec une multitude de formats et que la XR ne vient que rajouter une modalité supplémentaire.
Il me semble également intéressant de noter qu’en conclusion, les trois speakers partagent l’idée que la XR n’en est finalement qu’à ces débuts dans l’univers de la musique. En effet, de nombreuses possibilités sont à explorer comme le merchandising d’objets numériques ou les microtransactions. Les futures expériences de XR sont à inventer !
